Critique : Dear White People
Synopsis :
La vie de quatre étudiants noirs dans l‘une des plus prestigieuses facultés américaines, où une soirée à la fois populaire et scandaleuse organisée par des étudiants blancs va créer la polémique. Dear White People est une comédie satirique sur comment être noir dans un monde de blancs.
L’élection inattendue de la militante Samantha White à la tête d’une résidence universitaire historiquement noire, conduit à un affrontement interculturel remettant en question les conceptions de chacun sur ce que signifie qu’être noir.
Alors que Sam se fait une réputation grâce à sa provocante émission de radio « Dear White People », soutenant l’appartenance de la résidence Armstrong/Parker aux étudiants noirs ; Troy Fairbanks fils du doyen de l’université, décide de défier son père, en postulant pour le journal humoristique blanc de la faculté, « The Pastiche ». Lionel Higgins, geek fan de science fiction, est quant à lui recruté par un autre journal blanc de l’université, pour écrire sur la culture noire de Winschester. Et pendant ce temps, Coco Conners tente de se faire une place dans le milieu de la téléréalité en jouant la carte de la provocation.
Mais personne à Winchester University ne s’est préparé à la scandaleuse et outrancière soirée Halloween organisée par « The Pastiche », dont le thème n’est autre que « Libérez le Négro qui est en vous ». A la fin de la soirée, chacun devra choisir son camp.
Une comédie, certes. Mais sous couvert de cet aspect présagé léger, Dear White People porte un discours violent, et bouleversant, sur «comment être noir dans un monde de blanc» - pour citer le synopsis. Nous sommes en 2015, dans une société où le racisme envers les noirs est supposé s’être considérablement évadé. Peut-être. Nous n’en sommes plus aux mentalités effarantes de l’apartheid ou du temps de l’esclavage, bien sûr. Mais tout de même, ce serait mentir de ne pas relever les stéréotypes et préjugés insupportables encore bien ancrés aujourd’hui. Étant moi-même de couleur, je n’avance pas ces propos en l’air, et je peux vous assurer que ce film m’a fort ému et bouleversé.
Il est clair que les conditions sociétales aux États-Unis sont différentes de chez nous, même si en France, réside encore de lourds préjugés sur les personnes noires.
Le film est porté par le regard de quatre protagonistes, eux-mêmes, montrés comme quatre des probables archétypes/stéréotypes qu’on peut se faire sur la communauté noire. Il y a la bimbo canon, portant une perruque, ainsi donnant l’impression d’avoir des cheveux bien lisses - «pour faire comme les blanches», certains disent -, un jeune homme noir homosexuel, une militante très engagée, et un étudiant ambitieux, postulant pour le journal blanc de sa faculté.
Je pense, que de ces quatre personnages, celui qui s’apparente le plus à la réalité, le plus triste, celui que j’ai le plus reconnu, est celui de celle qu’on appelle «Coco», très bien interprété par la sublime Teyonah Parris. Une jeune femme qui correspond à un stéréotype souvent moqué. Un cliché matraqué par la télé poubelle américaine, celui de la bimbo noire portant souvent des perruques, et aux mimiques à la Nicki Minaj. Personnellement, il s’agit du personnage qui m’a le plus touché. Ce serait mentir de ne pas dire que beaucoup de femmes – et aussi d’hommes – noires tentent désespérément de coller aux canons dictés par la société dite «blanche» - je n’aime pas ce terme.
Tyra Banks s'est plusieurs fois essayée à la lace wig, afin d'arborer une coiffure plus occidentale.
Sur certaines photos, Beyoncé est retouchée pour paraître plus blanche.
En revanche, le personnage de Lionel, très bien joué par Tyler James Williams (Tout le monde déteste Chris) est également très intéressant, voire même inédit. Il est vrai qu’on présente très rarement l’homosexualité dans la communauté noire au cinéma, et de cette façon. Ce point de vue reste un des plus pertinents du film, par son authenticité et son caractère moderne. Même si certaines allusions du long-métrage peuvent faire sourire – ou rire jaune -, le final du film suscite l’écœurement. La mise en scène de cette fête déguisée dont le thème est «Libérez le Négro qui est en vous», porte le spectateur dans un malaise inévitable. On distingue même de répugnants déguisements de Nicki Minaj, ou encore de Lil Wayne.
Pour conclure, je dirais que ce Dear White People était une œuvre nécessaire, livrant un regard très fort et bouleversant sur une vérité qui continue de déranger. À voir absolument, et en VO.
Lewis